Dans quelle société
allons-nous vieillir ?

Les individus et les structures sociales ont accepté une évolution rapide de technologies numériques avancées, dans une optique de renforcement de leur propre sécurité. Favorisées par un effritement du sens du collectif et un repli sur soi, ces technologies participent à la concentration des pouvoirs technologiques, politiques et économiques. 

Malgré cela, des individus tentent, à leur manière, et par des initiatives diverses, de dépasser le pouvoir des algorithmes et cette résignation collective. Ils essaient de retrouver du collectif et de l’engagement, du hasard, et de la capacité à dévier de leurs itinéraires pré-tracés, pour se réapproprier, à leur échelle, les espaces délaissés. 

Les pouvoirs publics interviennent fortement, dans une volonté de pilotage normatif. L’intergénérationnel est un point d’entrée du sujet, dans la mesure où les populations âgées sont de plus en plus nombreuses : un aménagement et une organisation de l’espace se doivent de tenir compte des besoins spécifiques de chaque catégorie d’âge, en termes d’infrastructures (voies de circulation, équipements sportifs, etc.) mais aussi de lien (rencontre avec les habitants, solidarité organisée).

Le bât blesse à deux niveaux : le premier sur l’insuffisance des moyens accordés par les pouvoirs publics au regard des enjeux, et le glissement croissant vers des opérateurs privés pour apporter les solutions adéquates ; le second sur la stratification des politiques, conduisant à “perdre en route” les plus isolés et les plus démunis, s’ils ne se positionnent pas dans “la bonne case”. 

Suite à une rupture majeure, le sentiment de défiance généralisée vis-à-vis des institutions s’est concrétisé au travers d’une prise d’autonomie de multiples communautés et territoires à l’échelle locale. Les prérogatives de l’État centralisateur sont réduites au strict minimum, laissant le champ libre à un ensemble d’initiatives non coordonnées, redonnant, par là-même, du pouvoir d’action à celles et ceux qui les initient. 

Si certaines communautés vivent repliées sur elles-mêmes, et l'assument comme un élément de leur identité, d’autres, en revanche, connaissent des porosités, et de nouveaux (en)jeux de pouvoir se font jour. La solidarité et des mécanismes de redistribution peuvent y être à l’oeuvre, et les vieux comme les autres y sont traités de manière hétérogène : dans certains territoires, ils sont valorisés, porteurs d'histoire et de savoir-faire ; dans d'autres, ils sont déconsidérés à partir d'un certain âge, voire oubliés à leur mort. Tout dépend du village auquel ils appartiennent.